Affaire de battoir au lavoir de Creully en Octobre 1906

Avant de vous conter le fait ci-dessous, je vous prie d'accepter que je change les noms des laveuses concernées.
C'est drôle comme de laver du linge au lavoir, ça ne rafraîchit pas tou­jours les idées, au contraire.
Ainsi la mère Savonjaune et la mère Dubattoir, de Creully, qui lavaient leur linge sale en famille, l'autre jour, dans le lavoir commu­nal, se sont échauffées la tète au point de se dire des choses très désagréables.
Mais le plus triste, ou plutôt le plus gai de l'affaire, c'est que le mari de la mère Savonjaune, ayant voulu s'en mêler, la mère Dubattoir lui a ap­pliqué le sien à plat sur la joue.
Savonjaune eu a vu trente-six chan­delles, et c'est sans doute pour les éteindre qu'il s'est jeté dans le lavoir.
Par bonheur, il n'y avait que dix centimètres d'eau et il nage comme un rouget. N'empêche que, furieux et trempé, Savonjaunne alla porter plainte contre la mère Dubattoir, avec un œil au beurre noir.
Et, depuis ça, Savonjaune trouve que le battoir est un bien drôle d'ins­trument : quand il tape sur le linge, il le blanchit ; quand il tape sur la figure, il la noircit.